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te louer comme tu mérites de l’être ? — Quel homme, quel ange, qui pourrait dire ta beauté, ta grâce, ton empire, la splendeur de la gloire qui environne ton front, comme un mystique diadème ? Ô chasteté, ta dignité égale celle de l’ange ; tu rapproches l’homme de Dieu ; tu le rends semblable à l’éternelle et vierge Trinité : prima Trias Virgo est ! (St. Greg. Naz.) Par toi, le corps mortel et corruptible participe de l’immortalité et de l’incorruptibilité des Esprits, la chair se spiritualise, l’homme devient un ange ! Tu as dompté la nature, soumis la chair, et dédaigné le mariage ; tu nous fais aimer la vie solitaire et contemplative ; et tu as compris, que la plus grande volupté, c’est de se priver de toutes les voluptés matérielles ! — Ô chasteté, tu es plus blanche que la neige, plus radieuse et plus pure que la lumière des étoiles ! Rien, dans la nature, non rien, n’est assez beau pour te servir d’image, pour nous donner une idée de ton excellence : parmi toutes les vertus chrétiennes, tu es ce que paraît le lys parmi les fleurs, l’or parmi les métaux, le diamant parmi toutes les pierres précieuses ! Tu es comme la colombe, qui est humble, douce et solitaire ; comme l’aigle, qui aime les hauts lieux, et qui plane au-dessus des montagnes ; tu es enfin sur la terre ce qu’est l’ange dans le ciel !

Ô vous qui êtes vierges, ô vous qui êtes chastes, vous vivez dans le monde sans être du monde ; vous vivez dans un corps comme si vous n’en aviez pas ; quoiqu’enveloppés de chair, vous êtes comme de purs esprits ; votre âme est une couche embaumée où repose le Saint-Esprit ; votre âme est un ciel vivant, un Éden fleuri, un temple consacré, un tabernacle d’or, un lieu secret et mystique, fermé aux profanes, et scellé du sceau de l’Époux divin ! Ô vous qui êtes vierges, ô vous qui êtes chastes, vous êtes de la famille des anges ; vous êtes les anges de la terre, comme les anges sont les vierges du ciel !

Sainte virginité, sainte chasteté, c’est toi qui es la source divine du véritable enthousiasme ; et l’enthousiasme est le ressort puissant de la vertu et de la science, de la sainteté et du génie. La double fleur, la double couronne de la virginité et du génie a brillé sur le front de Saint-Jean l’Évangéliste, de Saint-Grégoire de Nazianze, de Saint-Thomas d’Aquin et de Sainte-Catherine de Sienne ; ils ont eu la plus haute intelligence, unie au cœur le plus aimant, dans le corps le plus pur ! Chez l’homme vierge ou chaste, la vitalité est tout entière au cerveau et dans le cœur ; la pensée illumine son front ; l’amour embrase, dilate son cœur ; tout ce qui est bon, tout ce qui est beau, tout ce qui est généreux, héroïque, sublime, c’est ce qui l’attire, l’exalte ; c’est ce qui excite, allume en lui la sainte ardeur de l’enthousiasme ; l’homme chaste est fait pour étonner le monde, qui ne le comprend pas, et pour marcher de conquête en conquête jusqu’au séjour glorieux où les anges doivent le couronner d’une brillante auréole, ornée de diamants et de pierres mystiques.

Une vierge est reine ; elle est reine, parce qu’elle se commande à elle-même, parce qu’elle commande à la nature, à la chair, aux hommes ; elle est reine parce qu’elle est l’épouse de Jésus-Christ, le Roi des rois ; elle est admirée des hommes et des anges, sur la terre et dans le ciel : Ah ! ne prononcez jamais le nom d’une vierge, sans penser à un ange, sans penser à Dieu !

L’homme chaste est comme enivré