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qui précède, et l’importance de la vocation, et les avantages incontestables de la vie religieuse, de la retraite et de la solitude, comme moyens de conversion et de salut ; on doit comprendre, par conséquent, les devoirs des supérieurs, des parents, des amis, de tous les fidèles en général, lorsqu’il s’agit de la vocation de l’un d’eux, et surtout de la vocation à la vie religieuse.

« Rien n’est plus opposé à l’esprit de la religion, plus contraire au bien des familles et de la société, que la contrainte qu’exercent trop souvent des parents imprudents sur leurs enfants pour leur faire embrasser un état auquel ils ne se sentent pas appelés.

« Les parents doivent à leurs enfants les conseils de leur expérience et de leur sagesse, pour les aider à choisir un état de vie convenable à leur condition ; mais il ne leur est pas permis de méconnaître, dans des penchants nobles, impérieux, raisonnables, l’indication des desseins particuliers de la providence, qui gouverne toutes choses. » (Godescard.)

« Écoutez l’Esprit-Saint s’exprimant par la voix de l’Église. Réunie en concile dans la ville de Trente, elle a frappé de tous ses anathèmes ceux ou celles qui, sans avoir des raisons légitimes, empêchent, de quelle que manière que ce soit, une fille ou toute femme de prendre le voile ou défaire ses vœux :

« Simili quoque anathemati subjicit eos qui sanctam virginum vel aliarum mulierum volontatem veli accipiendi, vel voti emittendi, quoquo modo, sine justâ causa, impedierint. (Conc. Tiid. sess. XXV. c. 18.)

« Longtemps auparavant, le concile de Tolède avait aussi frappé d’excommunication tous ceux qui empêcheraient une vierge ou une veuve de vivre dans la chasteté :

Si quis propositum castitatis viduae vel virginis impedierit, à sanctâ communione et à liminibus ecclesiæ extraneus habeatur. ( Conc. Tolet. 3, c. 10. )

« Ici nous devons prévenir une erreur : n’inférez pas de ces paroles qu’il soit permis d’empêcher un jeune homme de suivre son attrait ; il n’en est pas ainsi. Et si les pères réunis dans les deux conciles que nous venons de citer, n’ont parlé que des vierges, des veuves et autres femmes, c’est que celles-ci sont ordinairement plus faibles, moins libres, plus timides, et qu’ils ont pensé que les rigueurs et les menaces, dont quelquefois se servent les parents, produiraient sur leur cœur de plus tristes effets que sur celui des jeunes gens. » (La vocation, par Emmanuel de La Croix p. 155 ch. X. )

«  Les directeurs attachés au point d’honneur, et qui, selon Sainte-Thérèse, pensent qu’ils serviront mieux Dieu, étant tenus pour discrets, aiment une dévotion approuvée, louée, qui est dans l’applaudissement, et qui est bien éloignée de la vie de Jésus-Christ, qui a été l’homme de douleurs et de contradiction, l’opprobre des hommes et l’abjection du peuple. Les ignominies de la croix leur font peur, et ils en font peur à leurs dévotes. Le qu’en dira-t-on tient un empire sur leurs esprits, qui s’occupent grandement à considérer ce que l’on pense et dit d’eux. Le P. Jean de la Croix parle de certains qui, avec leurs goûts et leurs intérêts, ou parce qu’ils craignent là où il n’y a rien à craindre, font temporiser les âmes qui veulent quitter le monde, et y apportent tant de difficultés, et qui pis est, tâchent de les divertir de cette pensée ; et il appelle ces directeurs des pierres d’achoppement à l’entrée du ciel, faisant remarquer que cela arrive en deux manières : les uns le sachant, les autres l’ignorant ; encore que les uns et les autres n’en demeureront impunis ; car, puisque c’est leur office, ils sont obligés à savoir ce qu’ils font. Les sentiments de ce grand serviteur de Dieu me donnent lieu de remarquer ici le peu de foi, non seulement des directeurs, mais encore de plusieurs personnes dévotes, qui, ayant des enfants, ont une grande crainte qu’ils n’embrassent la vie religieuse. J’ai quelquefois considéré avec étonnement leur aveuglement incroyable, et leur dureté de cœur pour Dieu. » — (Le règne de Dieu dans l’oraison mentale, liv. IV, ch. VIII, par Marie Boudon.)

Mais ce ne sont pas seulement des laïques qui sont appelés à la vie religieuse ; beaucoup de prêtres y sont appelés aussi, des jeunes prêtres surtout, effrayés des devoirs et des périls du sacerdoce, ou attirés par l’amour de l’étude, de la retraite et de la contemplation.