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mi les personnes pieuses chez qui prédomine le système nerveux que se trouve cet accord parfait, cette intime et harmonieuse relation entre l’âme et les organes ; entre les organes et la matière subtile et éthérée, — les fluides, les essences, les effluves et les émanations invisibles, qui flottent ou circulent dans l’atmosphère.

Notre siècle est caractérisé par l’application des agents les plus subtils, — agents puissants et formidables : tels sont la vapeur et tous les fluides impondérables, c’est-à-dire, la matière à son plus haut degré d’élévation, de subtilité ; la matière comme spiritualisée. L’homme a créé des machines presque animées ; par la vapeur le monde est ébranlé jusqu’à son centre ; avec l’éclair électrique la pensée sillonne l’espace ; les deux pôles se touchent magnétiquement : l’homme a vu tout cela, il s’est complu en lui-même, et son orgueil a fait explosion, comme la matière fulminante !

Il y a des personnes chez qui toutes les sensations, et par conséquent tous les sentiments et toutes les pensées, ne sont que comme des notes brèves et fugaces, que comme des sons qui meurent en naissant ; tout ce qui les frappe ne fait que les effleurer ou les agiter un moment ; et puis, tout s’apaise, s’efface, et tout est oublié : — caractères légers, superficiels, inconstants, frivoles et mondains. Il y a d’autres personnes dont les sensations, et par conséquent les sentiments et les pensées, sont comme des notes langoureuses et gémissantes, prolongées indéfiniment, ou comme ces échos merveilleux qui répètent sans fin la voix qui les a réveillés ; tout en elle s’imprime d’une manière ineffaçable, tout s’y concentre, tout y vibre et retentit douloureusement : — caractères graves, rêveurs, contemplatifs, profonds, silencieux et solitaires. Les unes semblent nées pour rire et s’amuser ; les autres, pour souffrir et pleurer. Le bruit, l’éclat et le mouvement plaisent aux unes ; les autres se complaisent dans le silence, l’obscurité et le repos.


Where glow exalted sense and taste refin’d,
There keener anguish rankles in the mind ;
There feeling is diffus’d through ev’ry part,
Thrills in each nerve, and lives in all the heart ;
And those whose generous souls each tear would keep
From others’eyes, are born themselves to weep.

(H. Moore.)


The feeling hearts — touch them but lightly, — pour
A thousand melodies unheard before.

(Rogers.)

Il y a une troisième classe d’hommes dont l’organisation est tellement grossière ou émoussée, qu’elle paraît insensible ; rien ne l’émeut, ne l’attendrit ; tout glisse sur elle comme sur de la glace : — caractères froids, égoïstes, indifférents, et souvent cruels.


There are’tis true plebeian souls array’d
In one thick crust of apathy and shade,
Whose dull sensorium feels not once an age
A spirit brighten.

(Cawthorn.)

Nous ne parlerons ici que des personnes qui sont douées de cette organisation sensible et délicate, que le monde appelle maladives, parce qu’elles ne jouissent pas d’une force athlétique et d’une santé imperturbable, et qu’elles repoussent avec dégoût les sensualités de la table qui délectent l’homme animal ; parce qu’elles ont besoin de peu d’aliments, et qu’elles s’accommodent mieux d’une nourriture végétale et légère, — comme le pain, le riz, le maïs, etc. ; et de breuvages simples et purifiants, — comme l’eau douce et le café amer, ces virginales et spiritualisantes boissons, ces véhicules