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bile.— Et le serpent avance toujours, sans détacher ses yeux des yeux de sa victime convoitée. Ses mouvements deviennent plus rapides ; ses regards brillent d’un feu plus subtil ; sa gueule enflammée est béante d’avidité ; il tressaille, il s’élance, il est à ses pieds ! … Oh ! pauvre femme ! … Et il dresse sa tête, et il monte le long du corps, il l’entoure de plusieurs replis ; et il aspire le souffle de Rosalie ! … Il ne veut pas mordre sa victime inoffensive ; il ne veut que la fasciner, l’enivrer, l’endormir ; il ne veut que la faire défaillir dans un paisible évanouissement ; il ne veut que la tenir dans une douce langueur, sous le charme vainqueur de sa puissance magnétique.

Issabé, qui avait été à la cabane de sa fiancée, et ne l’y avait pas trouvée, suit la trace marquée par les feuilles de sumac, et arrive au pied du grand magnolia… Quel spectacle frappe ses regards épouvantés ! … Hélas ! que Lossima avait raison, lorsqu’elle s’est écriée : « Oh ! mon pauvre frère ! oh ma pauvre Rosalie ! » Elle était, en ce moment, douée de la seconde vue ; elle avait la clairvoyance du cœur.

A peine Issabé avait-il vu, en frissonnant, le serpent qui enlaçait sa fiancée de ses plis amoureux, qu’en levant les yeux il aperçoit, allongée et tapie sur un rameau du magnolia, une panthère tremblante : Saisie d’effroi, pétrifiée de terreur à l’aspect du serpent à sonnettes, une sueur froide ruisselle des membres de cet animal si sauvage et