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Que d’un cours sinueux traversant les vallées,
Le fleuve s’engloutît dans les plaines salées :
Qu’on vît toujours aux fleurs succéder les moissons,
Et les fruits précéder le règne des glaçons ;
Que l’ambre hérissât la bruyante Baltique ;
Que l’ébène ombrageât la rive asiatique ;
Que le sol des incas d’un or pur s’enrichît ;
Que dans les flots d’Ormus la perle se blanchît ;
Qu’aux veines des rochers, une chaleur féconde
Changeât en diamant le sable de Golconde ;
Que le fleuve du Caire, en ses profondes eaux,
Prêtât au crocodile un abri de roseaux ;
Que le phoque rampât aux bords de la Finlande ;
Que l’ours dormît trois mois sur les rochers d’Islande ;
Que sous le pôle même, où vingt fleuves glacés
Apportent le tribut des hyvers entassés,
Éparses en troupeaux, les énormes baleines
Du sauvage océan fîssent mugir les plaines ;
Et qu’au bord de ces lacs, où cent forts démolis
Au triste Canada font regretter nos lys,
Le castor, avec nous disputant d’industrie,
De hardis monumens embellît sa patrie,