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Carbon, à Roxane.

Ouvrez la main qui tient votre mouchoir.

Roxane, ouvre la main et le mouchoir tombe.

Ouvrez la main qui tient votre mouchoir.Pourquoi ?

(Toute la compagnie fait le mouvement de s’élancer pour le ramasser.)

Carbon, le ramassant vivement.

Ma compagnie était sans drapeau ! Mais, ma foi,
C’est le plus beau du camp qui flottera sur elle !

Roxane, souriant.

Il est un peu petit.

Carbon, attachant le mouchoir à la hampe de sa lance de capitaine.

Il est un peu petit.Mais il est en dentelle !

Un cadet, aux autres.

Je mourrais sans regrets ayant vu ce minois,
Si j’avais seulement dans le ventre une noix !…

Carbon, qui l’a entendu, indigné.

Fi ! parler de manger lorsqu’une exquise femme !…

Roxane.

Mais l’air du camp est vif et, moi-même, m’affame :
Pâtés, chauds-froids, vins fins : — mon menu, le voilà !
— Voulez-vous m’apportez tout cela !

(Consternation.)

Un cadet.

— Voulez-vous m’apportez tout cela !Tout cela !

Un autre.

Où le prendrions-nous, grand Dieu ?

Roxane, tranquillement.

Où le prendrions-nous, grand Dieu ?Dans mon carrosse.

Tous.

Hein ?…

Roxane.

Hein ?…Mais il faut qu’on serve et découpe, et désosse !
Regardez mon cocher d’un peu plus près messieurs,
Et vous reconnaîtrez un homme précieux :
Chaque sauce sera, si l’on veut, réchauffée !