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Roxane, qui allait refermer sa fenêtre, s’arrêtant.

De n’aimer plus… quand… j’aime plus !Tiens ! mais c’est mieux !

Christian, même jeu.

L’amour grandit bercé dans mon âme inquiète…
Que ce… cruel marmot prit pour… barcelonnette !

Roxane, s’avançant sur le balcon.

C’est mieux ! — Mais, puisqu’il est cruel, vous fûtes sot
De ne pas, cet amour, l’étouffer au berceau !

Christian, même jeu.

Aussi l’ai-je tenté, mais… tentative nulle :
Ce… nouveau-né, Madame, est un petit… Hercule.

Roxane.

C’est mieux !

Christian, même jeu.

C’est mieux !De sorte qu’il… strangula comme rien…
Les deux serpents… Orgueil et… Doute.

Roxane, s’accoudant au balcon.

Les deux serpents… Orgueil et… Doute.Ah ! c’est très bien.
— Mais pourquoi parlez-vous de façon peu hâtive ?
Auriez-vous donc la goutte à l’imaginative ?

Cyrano, tirant Christian sous le balcon et se glissant à sa place.

Chut ! Cela devient trop difficile !…

Roxane.

Chut ! Cela devient trop difficile !…Aujourd’hui…
Vos mots sont hésitants. Pourquoi ?

Cyrano, parlant à mi-voix, comme Christian.

Vos mots sont hésitants. Pourquoi ?C’est qu’il fait nuit,
Dans cette ombre, à tâtons, ils cherchent votre oreille.

Roxane.

Les miens n’éprouvent pas difficulté pareille.

Cyrano.

Ils trouvent tout de suite ? oh ! cela va de soi,
Puisque c’est dans mon cœur, eux, que je les reçoi ;
Or, moi, j’ai le cœur grand, vous, l’oreille petite.
D’ailleurs vos mots à vous, descendent : ils vont vite,
Les miens montent, Madame : il leur faut plus de temps !