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CONTINUA. DES AMOURS

Hyer en vous couchant, vous me fistes promesse
D’estre plus-tost que moi ce matin eveillée,
Mais le someil vous tient encor toute sillée :
Jan, je vous punirai du peché de paresse,
Je vois baiser cent fois vostre oeil, vostre tetin,
Afin de vous aprendre à vous lever matin.


Bayf, il semble à voir tes rymes langoreuses,
Que tu sois seul amant, en France, langoreus,
Et que tes compaignons ne sont point amoureus,
Mais font languir leurs vers desous feintes pleureuses ;
Tu te trompes, Bayf ; les peines doloreuses
D’amour autant que toi nous rendent doloreus,
Sans nous feindre un tourment : mais tu es plus heureus
Que nous, à raconter tes peines amoureuses.
Quant à moi, si j’estois ta Francine chantée,
Je ne serois jamais de ton vers enchantée,
Qui se faignant un dueil se fait palir lui-mesme.
Non, celui n’aime point, ou bien il aime peu,
Qui peut donner par signe à cognoistre son feu,
Et qui peut raconter le quart de ce qu’il aime.


Je ne suis variable, & si ne veus apprendre
(Desja grison) à l’estre, aussi ce nest qu’émoi :
Je ne dy pas si Jane estoit prise de moi ;
Que tost je n’oubliasse & Marie & Cassandre.