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O cruautez ! ô beautez trop iniques !
Le pelerin touche bien aux reliques
Par le travers d’une vitre, ou d’un bois.

XIII

Pour retenir un amant en servage,
Il faut aimer, et non dissimuler,
De mesme flame amoureuse brusler,
Et que le cœur soit pareil au langage :
Tousjours un ris, tousjours un bon visage,
Tousjours s’escrire et s’entre-consoler :
Ou qui ne peut escrire ny parler,
A tout le moins s’entre-voir par message.
Il faut avoir de l’amy le portraict,
Cent fois le jour en rebaiser le traict :
Que d’un plaisir deux ames soient guidées.
Deux corps en un rejoincts en leur moitié.
Voyla les poincts qui gardent l’amitié,
Et non pas vous qui n’aimez qu’en idées.

XIIII

Mon ame vit en servage arrestée :
Il adviendra, Dame, ce qu’il pourra :
Le cœur vivra te servant, et mourra :
Ce m’est tout un, la chance en est jettée.
Je suis joyeux dequoy tu m’as ostée
La liberté, et mon esprit sera
D’autant heureux, que serf il se verra
De ta beauté, des Astres empruntée.