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Que de luxurieux qui font les bons apôtres ?
Toute virginité cache un mauvais frisson,
Et souvent la candeur n’est qu’un rose hameçon
Devant mieux amorcer la luxure des autres.

Elle joue à son gré le flegme et la stupeur,
Sait ravaler la honte aussi bien que la haine,
Et n’hésite jamais quand son besoin l’entraîne
À marcher sur l’amour, l’avarice et la peur.

Parfois cette barbare, en ses cruautés vaines,
Imagine au milieu de l’ombre et du secret
Un corps adolescent qui se convulserait
En pleurant sur les draps les larmes de ses veines.

Et toujours ce grand sphinx enverminé d’ennui,
Moitié dans un cloaque et moitié dans la nue,
Cherche le cri nouveau sur la bouche inconnue
Et la forme d’hier dans celle d’aujourd’hui.