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62 LES ORIGINES DU THÉÂTRE LYRIQUE MODERNE.

En 1589, pour le mariage de D. Ferdinando Medici et Madame Gristiana de Lorraine, grands-ducs de Toscane, Luca Marenzio, le premier compositeur de Florence, écrit le Combat d* Apollon avec le serpent Python , sujet évidemment inspiré des concours musicaux aux jeux Pythiques (1).

A la vérité, l'œuvre de Marenzio, comme celle de Gabrieli, sont encore conçues dans l'ancien style de la musique du sei- zième siècle.

Les chœurs de Gabreli sont empreints de la gravité religieuse de ses compositions d'église, et ne sont pas à proprement parler des œuvres dramatiques. Mais il faut noter que, dès cette parti- tion (1588). il y a des monodies clairement marquées : « Solo. » De plus, les quatre chœurs d'OEdipe se modèlent exactement sur les vers de la traduction italienne, se divisant tour à tour en deux, trois, quatre et six voix, avec un effort scrupuleux pour suivre la déclamation lyrique, en noter l'accent et en doubler la valeur.

Chez Marenzio, le dialogue de Rinuccini était évidemment dé- clamé. Les seuls morceaux qui nous restent sont trois chœurs du peuple de Délos, à douze, quatre et huit voix. Il eût été assez sur- prenant qu'un maître du madrigal, musicien de la chapelle Six- tine, fût entré dès l'abord dans les réformes des lettrés florentins. Mais sa tendresse et cette gracieuse sensibilité, qui lui avait fait donner le nom du « più dolce cigno dell' Italia , » le rendait pro- pre plus qu'un autre à prendre la direction de l'art nouveau.

(1) On retrouvera, dans le beau livre de M. Gevaert sur la Musique grec- que, la description du Nome Pythique, d'après un passage de Pollux, qui en donne le programme (IV, 84). C'était une Sonate ou Concerto, de genre essentiellement descriptif et imitatif, qui remontait jusqu'à 600 avant Jésus- Christ, à Sacadas d'Argos. Le cadre en était invariable.

C'était la lutte d'Apollon et du serpent, en 5 parties :

1° Introduction. — Le dieu observe le terrain et examine s'il est propre au combat.

2° La provocation. — Il défie le dragon.

3° L'iambique. — Le combat s'engage. Le soliste imitait les fanfares de trompette, et faisait entendre un trait particulier à Vaulos (l'ôÔovTta[ji6ç), exprimant les grincements de dents du monstre.

4° La prière. — La victoire du dieu est célébrée.

5° Ovation. — Apollon entonne d-es chants de triomphe.

Cette sonate était un solo d'instrument; d'abord réservée à Vaulos, elle passa aux instruments à cordes. Aucun virtuose ne se dispensait de jouer son concerto, son « Pythicon » devant le public. On peut dire que Wagner a écrit, lui aussi, son « Pythicon » dans Siegfried (lutte du héros et du dragon Fafner).

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