temps de guerre » : on l’accusait de propagande pacifiste dans les milieux ouvriers, où Thouron, disait-on, répandait les écrits de Clerambault, d’accord avec l’auteur. Rien n’était moins fondé : Clerambault n’avait connaissance d’aucune propagande de ce genre, et il ne l’avait pas autorisée. Thouron en pouvait témoigner. — Mais voici que, justement, Thouron n’en témoignait pas. Son attitude était étrange. Au lieu d’établir les faits, il biaisait, il avait l’air de cacher quelque chose ; il y mettait même une sorte d’ostentation : il eût voulu éveiller les soupçons qu’il ne s’y fût pas mieux pris. Le malheur était que ces soupçons dérivaient vers Clerambault. Certes, il ne disait rien contre lui, contre quiconque. Il se refusait à rien dire. Mais il laissait entendre que s’il voulait parler… Il ne le voulait pas. On le confronta avec Clerambault. Il fut parfait, vraiment chevaleresque. Il mit la main sur son cœur ; il protesta de son admiration filiale pour le « Maître », pour l’ « Ami ». Clerambault, impatienté, le pressa de faire le récit exact de tout ce qui s’était passé entre eux : l’autre continuait d’attester son dévouement « indéfectible » : il ne dirait rien de plus, il n’ajouterait rien à ses dépositions, il prenait tout sur lui…
Il sortit de là grandi, et Clerambault suspect de se laisser abriter par le sacrifice de son leude. La presse n’hésita point : elle l’accusa de lâcheté. Cependant, les convocations succédaient aux convocations ; depuis près de deux mois, Clerambault se rendait aux interrogatoires oiseux que le juge lui posait, sans qu’aucune décision se dessinât encore. Il eût semblé qu’un