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imméritées. Tout le système actuel d’économie du monde est funeste et vicieux : il faut y remédier. Mais la guerre, qui cherche à escroquer le concurrent plus habile ou plus heureux, au profit du plus maladroit ou du plus paresseux, ne fait qu’empirer le vice du système : elle enrichit quelques-uns, et ruine la communauté.

Tous les peuples ne peuvent, sur la même route, marcher du même pas. A tour de rôle, les uns dépassent les autres, et sont dépassés à leur tour. Qu’importe, s’ils ne forment qu’une même colonne ! Point de sot amour-propre ! Le pôle de l’énergie du monde se déplace constamment. Dans un morne pays, il a souvent changé : de la Provence romaine, il a passé en France à la Loire des Valois, il est maintenant à Paris, il ne restera pas toujours. La terre tout entière obéit à un rythme alterné de printemps fécond et d’automne qui s’endort. Les voies commerciales ne demeurent pas immuables. Les richesses du sous-sol ne sont pas inépuisables. Un peuple qui s’est, pendant des siècles, dépensé sans compter, s’achemine, par sa gloire, à son déclin ; il ne subsistera qu’en renonçant à la pureté de son sang et le mêlant aux autres. Il est vain, il est criminel de prétendre prolonger sa maturité passée, en empêchant celle des autres. Tels nos vieillards d’aujourd’hui qui envoient les jeunes hommes à la mort. Cela ne les rend pas plus jeunes. Et ils tuent l’avenir.

Au lieu de s’enrager contre les lois de la vie, un peuple sain cherche à comprendre ces lois ; il voit son vrai progrès, non dans une volonté stupide qui s’en-