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l’adagio[1], il a écrit : « Peut-être le chœur entrerait-il convenablement ici ». Mais il ne pouvait se décider à se séparer de son fidèle orchestre. « Quand une idée me vient, disait-il, je l’entends dans un instrument, jamais dans les voix. » Aussi recule-t-il le plus possible le moment d’employer les voix ; et il va jusqu’à donner d’abord aux instruments, non seulement les récitatifs du finale[2], mais le thème même de la Joie.

Mais il faut aller plus avant encore dans l’explication de ces hésitations et de ces retards : la cause en est plus profonde. Ce malheureux homme, toujours tourmenté par le chagrin, a toujours aspiré à chanter l’excellence de la Joie ; et, d’année en année, il remettait sa tâche, sans cesse repris par le tourbillon de ses passions et par sa mélancolie. Ce n’est qu’au dernier jour qu’il y est parvenu. Mais avec quelle grandeur !

  1. Bibliothèque de Berlin.
  2. Also ganz so als ständen Worte darunter. (« Tout à fait comme s’il y avait des paroles dessous. »)