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de force et de génie. « Je suis, a-t-il dit lui-même, je suis le Bacchus qui broie le délicieux nectar pour l’humanité. C’est moi qui donne aux hommes la divine frénésie de l’esprit. » Je ne sais si, comme l’a écrit Wagner, il a voulu peindre dans le finale de sa Symphonie une fête dionysiaque[1]. Je reconnais surtout dans cette fougueuse kermesse la marque de son hérédité flamande, de même que je retrouve son origine dans son audacieuse liberté de langage et de manières, qui détonne superbement dans le pays de la discipline et de l’obéissance. Nulle part plus de franchise et de libre puissance que dans la Symphonie en la. C’est une dépense folle d’énergies surhumaines, sans but, pour le plaisir, un plaisir de fleuve qui déborde et submerge. Dans la Huitième Symphonie, la force est moins grandiose, mais plus étrange encore, et plus caractéristique de

  1. C’est, en tout cas, un sujet auquel Beethoven a pensé : car nous le trouvons dans ses notes, et, particulièrement, dans ses projets d’une Dixième Symphonie.