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figure de Beethoven s’y montre colorée des reflets de ces guerres épiques. Partout elles s’expriment, peut-être à son insu, dans les œuvres de cette période : dans l’Ouverture de Coriolan (1807), où soufflent des tempêtes, dans le Quatrième quatuor, op. 18, dont le premier morceau a tant de parenté avec cette ouverture ; dans la Sonate Appassionata, op. 57 (1804), dont Bismarck disait : « Si je l’entendais souvent, je serais toujours très vaillant[1] » : dans la partition d’Egmont ; et jusque dans ses concertos pour piano, dans ce concerto en mi bémol, op. 73 (1809), où la virtuosité même se fait héroïque, où passent des armées. — Comment s’en étonner ? Si Beethoven ignorait, en écrivant la Marche funèbre sur la mort d’un héros

  1. Robert de Keudell, ancien ambassadeur d’Allemagne à Rome : Bismarck et sa famille, 1901, traduction française de E.-B. Lang.
    Robert de Keudell joua cette sonate à Bismarck, sur un mauvais piano, le 30 octobre 1870, à Versailles. Bismarck disait de la dernière phrase de l’œuvre : « Ce sont les luttes et les sanglots de toute une vie. » Il préférait Beethoven à tout autre musicien, et, plus d’une fois, affirma : « Beethoven convient le mieux à mes nerfs. »