Page:Rolland - Vie de Beethoven.djvu/26

Cette page a été validée par deux contributeurs.
10
BEETHOVEN.

n’oublia la vallée du Rhin, et le grand fleuve auguste et paternel, unser Vater Rhein, comme il l’appelle, « notre père le Rhin », si vivant, en effet, presque humain, pareil à une âme gigantesque où passent des pensées et des forces innombrables, nulle part plus beau, plus puissant et plus doux qu’en la délicieuse Bonn, dont il baigne les pentes ombragées et fleuries, avec une violence caressante. Là, Beethoven a vécu ses vingt premières années ; là se sont formés les rêves de son cœur adolescent, — dans ces prairies qui flottent languissamment sur l’eau, avec leurs peupliers enveloppés de brouillards, les buissons et les saules, et les arbres fruitiers, qui trempent leurs racines dans le courant silencieux et rapide, — et, penchés sur le bord, mollement curieux, les villages, les églises, les cimetières même, — tandis qu’à l’horizon, les Sept Montagnes bleuâtres dessinent sur le ciel leurs profils orageux, que surmontent les maigres et bizarres silhouettes des vieux châteaux ruinés. À ce pays,