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MUSICIENS D’AUJOURD’HUI.

contre l’apathie environnante ; mais bien souvent aussi elles ont allumé autour d’elles de petits foyers de compréhension et d’amour artistiques, qui ne demandaient qu’à flamber ; et il est bien rare que même les moins heureuses n’aient pas réussi à semer quelques étincelles, qui couvent dans les âmes[1].

À la suite de ces efforts individuels, l’État finit par prendre part à ce mouvement d’éducation, dont il s’était si longtemps désintéressé[2]. Il découvrit, à son tour, la valeur éducatrice du chant. Une épreuve musicale fut rétablie aux examens du Brevet supérieur[3] : ce qui obligea à prendre plus au sérieux l’étude du solfège dans les Écoles Normales. En 1903, on chercha enfin à organiser l’enseignement de la musique dans les lycées et les collèges, d’une façon plus rationnelle qu’il n’existait jusque-là[4]. En 1904, après des rapports de M. Saint-Saëns et de M. Bourgault-Ducoudray, pour organiser le chant collectif en le reliant aux matières du programme d’enseignement[5], on fonda à Paris une École gratuite

  1. Il faudrait citer, notamment, ces petits groupements de jeunes intellectuels — élèves des Facultés ou des grandes bcoies — qui se dévouent, en ce moment, à l’instruction, à la fois morale et musicale, du peuple. Telle, cette Manécanterie des petits chanteurs de la Croix de bois, qui, depuis moins d’un an, a formé à Vaugirard une petite maîtrise d’enfants du peuple, allant chanter, d’église en église, dans les paroisses pauvres, la musique palestrinienne et grégorienne.
  2. Faut-il rappeler cet article malencontreux de la loi du 15 mars 1850 : « L’enseignement primaire peut comprendre en outre le chant ».
  3. Par décret du 4 août 1905. En même temps, on publiait un programme et des directions pédagogiques. On insistait sur l’importance de la dictée musicale, et sur l’utilité de la méthode galiniste pour les débutants.

    Souhaitons que l’État se décide à soutenir officiellement partout la campagne de M. Bouchor, et qu’il introduise peu à peu dans ses écoles les méthodes de gymnastique rythmique de M. Jaques-Dalcroze, qui ont donné de si étonnants résultats en Suisse.

  4. Projet de M. Chaumié. Voir Revue Musicale, 15 juillet 1903.
  5. Revue Musicale, 15 décembre 1903, 1er et 15 janvier 1904.