Paris où, il y a quarante ans, on aurait eu grand’peine à réunir deux ou trois quatuors d’amateurs, Victor Charpentier réussit à grouper autour de lui 150 bons instrumentistes[1], qui, sous sa direction, ou sous celle de Saint-Saëns et de Gabriel Fauré, ont déjà donné 17 concerts gratuits, dont 10 au Trocadéro[2]. Il faut souhaiter que l’État soutienne, d’une façon un peu plus efficace qu’il ne l’a fait jusqu’ici, une œuvre aussi libéralement populaire[3].
- ↑ Dont 90 violons, 15 altos et 15 violoncelles. Il est malheureusement beaucoup plus difficile de recruter les bois et les cuivres.
- ↑ On y exécute de la musique classique (Bach, Hændel, Gluck,
Rameau, Beethoven), et de la musique moderne (Berlioz, Saint-Saëns,
Dukas, etc.).
L’Orchestre vient de s’installer dans l’ancienne chapelle des Dominicains du Faubourg-Saint-Honoré, dont il a obtenu la concession.
- ↑ Dans ces dernières années, on a vu à Paris une véritable
éclosion de concerts, à des prix populaires, — quelques-uns à
l’imitation des Restaurationskonzerte allemands, comme les Concerts-Rouge,
les Concerts-Touche, etc., où l’on fait entendre de
la musique symphonique, classique et moderne. Ils sont en
plein développement, et ont beaucoup de succès. Toutefois, il y
a encore loin de ces essais, qui d’ailleurs attirent un public
presque exclusivement bourgeois, à telles auditions populaires
des oratorios de Hændel à Londres, où les places sont à six et
douze sous.
Je n’attacherai pas non plus une très grande importance au généreux mouvement, pas très sensé toujours, des Universités Populaires, où, depuis 1886, une foule d’amateurs, de gens du monde et d’artistes vinrent se faire entendre et prétendirent initier le peuple aux œuvres les plus compliquées, parfois, et les plus aristocratiques de l’art classique ou décadent. Tout en rendant hommage à cet apostolat, dont l’ardeur s’est d’ailleurs beaucoup ralentie, il faut bien dire qu’il faisait preuve de plus de bonne volonté que de sens pratique. Il ne s’agit pas d’amuser le peuple, — et, encore moins, de l’ennuyer. — Il s’agit de lui apprendre la musique.
Ce n’est pas toujours commode. Ce n’est pas là une œuvre d’action tapageuse, mais de dévouement et de patience. Les bonnes intentions ne suffisent pas. On sait l’échec final du Conservatoire populaire de Mimi Pinson, fondé par Gustave Charpentier pour donner une éducation musicale aux ouvrières parisiennes.