pose une telle somme de dévouement qu’on aurait mauvaise grâce à se mêler aux critiques que la Schola s’est attirées, dans ces derniers temps, et qu’elle mérite parfois. Il y a des petitesses même dans les grands artistes, et des imperfections dans toute œuvre humaine ; les défauts se révèlent surtout après la victoire. La Schola n’échappe pas à la crise de croissance, par où passe toute œuvre qui triomphe et qui dure. Sans doute, la brusque maladie et la retraite prématurée du fondateur de l’œuvre, de celui qui en était resté l’âme, M. Charles Bordes, surmené par le labeur écrasant, qu’il avait porté presque seul pendant dix ans, privèrent la Schola d’une de ses forces les plus actives et les plus nécessaires peut-être à son harmonieux développement Mais M. Vincent d’Indy, dont le généreux apostolat[1]. continue de diriger la Schola, d’une main ferme et jamais lassée, malgré sa multiple activité de compositeur, de professeur et de Kapellmeister, est le plus sûr et le plus solide des guides pour une jeune école de musique française. Et si parfois son intelligence un peu abstraite, son humeur combative, et certains préjugés, qui ne sont pas tous musicaux, le font pencher vers un idéal de raison et de foi immobile, — si parfois ses disciples, déformant inconsciemment sa pensée, risquent de se mettre en opposition avec le courant sans
- ↑ M. Charles Bordes n’abandonna point la latte. Forcé de se retirer dans le Midi, pour sa santé, il y fonda aussitôt, en novembre 1905, la Schola de Montpellier ; et il y donna, depuis, une quinzaine de concerts par an ; il y fit entendre des cantates de Bach, des actes de Rameau et de Gluck, des oratorios de Franck, l’Orfeo de Monteverdi. En 1906, il fit jouer, dans un théâtre de verdure, la Guirlande de Rameau. En janvier 1908, il donna Castor et Pollux au théâtre de Montpellier. Cet homme, d’une incroyable ardeur, que rien ne pouvait lasser, projetait de créer à Montpellier une école d’application théâtrale pour la remise en scène des opéras du xviie et du xviiie siècle, quand la mort le frappa, à quarante-quatre ans, en novembre 1909, privant l’art français d’un de ses serviteurs les meilleurs et les plus désintéressés.