par la pensée d’auteurs vivants et présents ; et le plus grand service qu’il rendit à la musique française fut de créer, grâce à son souci extrême de la perfection matérielle, un orchestre qui fût un merveilleux instrument symphonique.
Ce souci de la perfection a été gardé par son successeur, M. Camille Chevillard, et son orchestre s’est encore affiné. On peut dire qu’il est aujourd’hui le meilleur de Paris. M. Chevillard se sentait plus attiré que Lamoureux par la musique pure ; il trouvait avec raison que la musique dramatique tenait une trop grande place dans les concerts parisiens. Dans une lettre, publiée par le Mercure de France en janvier 1903, il reproche aux éducateurs du goût français d’avoir trop cultivé la prédilection du public pour l’opéra, et de n’avoir pas éveillé son attention pour la supériorité de la pure musique : « Quatre mesures au hasard d’un quatuor de Mozart ont, dit-il, une plus grande valeur éducative qu’une fastueuse scène d’opéra ». — Nul ne dirige mieux à Paris les œuvres classiques, surtout celles de pure beauté plastique ; même en Allemagne, il serait difficile de trouver une interprétation aussi délicate de certaines œuvres symphoniques de Mozart ou de Hsendel. Son orchestre a d’ailleurs conservé la supériorité qu’il avait déjà acquise dans le répertoire wagnérien. Mais M. Chevillard lui a communiqué une chaleur et une vigueur de rythme qu’il n’avait pas avant lui. Ses interprétations beethovéniennes, encore que superficielles, sont vivantes. Comme Lamoureux, M. Chevillard a peu le sens des œuvres romantiques françaises, de Berlioz, et encore moins de Franck et de son école ; il semble n’avoir qu’une sympathie mitigée pour les courants les plus récents de la musique française. Mais il comprend bien les romantiques allemands, surtout Schumann, pour qui il a une prédilection ; il s’est efforcé, sans y très bien réussir, de faire pénétrer en France Liszt et