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LES INSTITUTIONS MUSICALES NOUVELLES

I. — la société nationale

La musique française avait déjà, avant 1870, dans l’Opéra et l’Opéra-Comique (sans parler de divers essais de Théâtre Lyrique) un débouché à peu près suffisant pour sa production dramatique. Même au plus fort de la décadence du goût musical, les œuvres de Gounod, d’Ambroise Thomas, de Massé, avaient toujours maintenu le renom de l’opéra et de l’opéra-comique français. Mais ce qui manquait presque absolument, c’était un débouché pour la musique symphonique et la musique de chambre. « Avant 1870, écrit M. Camille Saint-Saëns dans son livre : Harmonie et Mélodie, un compositeur français qui aurait eu la folie de se risquer sur le terrain de la musique instrumentale, n’avait aucun autre moyen de faire exécuter ses œuvres que d’organiser soi-même un concert, et d’y inviter ses amis et la critique. » Tel avait été le cas pour Berlioz, qui devait à chaque fois rassembler un orchestre et louer une salle pour faire entendre ses grandes symphonies ; et le résultat financier était souvent désastreux : l’exécution de la Damnation de Faust, en 1846, fut pour lui une vraie faillite : il fallut y renoncer. Le Conservatoire, jadis plus accueillant, s’entr’ouvrait à peine pour un morceau de l’Enfance du Christ. Les jeunes compositeurs n’avaient rien à en attendre.