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PARIS ET LA MUSIQUE


La physionomie de Paris est si complexe et si mobile qu’il y a quelque présomption à la vouloir fixer. Cette ville nerveuse, d’une inconstance passionnée, a des goûts trop changeants pour qu’on n’ait pas lieu de craindre qu’un livre qui la dépeint, vrai au moment où on l’écrit, ne le soit déjà plus au moment où il paraît. Puis, il n’y a pas qu’un seul Paris, il y en a trois ou quatre : — Paris mondain, Paris bourgeois, Paris intellectuel, Paris populaire, — qui vivent côte à côte et se pénètrent à peine. Qui ne connaît point ces petites villes dans la Ville ne peut se représenter l’ensemble, et la vie puissante, souvent contradictoire, de ce gigantesque organisme.

Si l’on veut donc avoir un aperçu de la vie musicale à Paris, il faut tenir compte de la variété des milieux et du mouvement perpétuel des idées, qui jamais ne s’arrête, et dépasse sans cesse le but qu’il semblait s’être fixé. Ce changement incessant du goût est, à l’étranger, qualifié dédaigneusement de Mode. Et sans doute y a-t-il dans l’élite artistique de Paris, comme de toutes les grandes villes, un troupeau de désœuvrés, à l’affût de toutes les modes nouvelles — en art comme en toilette, — qui peuvent les singulariser, sans qu’aucune raison sérieuse les allache à celle-ci plutôt qu’à celle-là. Mais,