racheter ses péchés. L’intelligence de Don Quichotte s’embrouille, avec la nôtre, au milieu de ces lectures ; il devient fou. — Il part en compagnie de son écuyer. Les deux figures sont dessinées avec esprit : l’une raide, langoureuse, vieil Espagnol ombrageux et un peu troubadour, déviant dans ses idées, mais revenant toujours à sa marotte ; l’autre, ronde, joviale, paysan madré, au malin rabâchage, dont la musique traduit les proverbes goguenards par des phrases à courte haleine, qui retournent toujours au point de départ. — Leurs aventures commencent ; et voici les moulins à vent (trilles des violons et bois), et l’armée bêlante du grand empereur Alifanfaron (trémolos des bois). Et voici encore, dans la troisième variation, un dialogue entre le chevalier et son écuyer, où nous devons deviner que Sancho interroge son maître sur les avantages de la vie chevaleresque, qui lui semblent douteux. Don Quichotte lui parle de gloire et d’honneur ; mais Sancho n’en a cure. Et à ces grands mots il répond toujours par gain positif, grasses lippées, monnaie sonnante. — Puis recommencent les aventures. Les deux compagnons traversent les airs sur le cheval de bois. Et les passages chromatiques des flûtes, les harpes, les timbales, et une « machine à vent » {Windmaschine), expriment l’illusion du voyage vertigineux, « tandis que le trémolo des contrebasses sur le ton fondamental montre que le cheval n’a jamais quitté le sol[1] ».
Je m’arrête. C’est assez pour montrer le jeu auquel s’est livré l’auteur. Lorsqu’on entend l’œuvre, on ne peut s’empêcher d’admirer la virtuosité du style et de l’orchestration, et le sens comique de Strauss. D’autant plus est-on surpris qu’il s’astreigne à des illustrations de textes[2], quand il est si capable de créer de toutes