le flot de vie débordante, la fièvre de joie qui fait tourbillonner ces mondes.
Zarathastrâ montrait les progrès de l’individualisme méprisant de Strauss, de cet esprit « qui hait les chiens de la populace et toute cette engeance manquée et sombre, — cette tempête riante, cet esprit de tempête qui danse sur les marécages et les tristesses comme sur des prairies[1] ». — Cet esprit se rit de lui-même et de son idéalisme, dans le Don Quixote de 1897, fantastische Variationen über ein Thema ritterlichen Charakters (Don Quichotte, variations fantastiques sur un thème de caractère chevaleresque), op. 35. Cette symphonie marque, je crois, le dernier point où peut arriver la musique à programme. Dans nulle autre œuvre, Strauss ne fait preuve de plus d’intelligence, d’esprit, et de prodigieuse habileté ; et il n’y en a pas, je le dis sincèrement, où tant de forces soient dépensées davantage en pure perte, pour un jeu, une plaisanterie musicale, qui dure quarante-cinq minutes, et oblige l’auteur, les exécutants et le public à un travail pénible. C’est de beaucoup le plus difficile à jouer de ces poèmes symphoniques, à cause de la complexité, de l’indépendance, et des fantasques caprices des parties. — Qu’on juge de ce que l’auteur exige de la musique par quelques extraits du programme :
L’introduction représente Don Quichotte enfoncé dans la lecture des romans de chevalerie ; et, ainsi que dans les vieux petits tableaux flamands ou hollandais, il nous faut non seulement voir dans la musique les traits de Don Quichotte, mais lire les livres qu’il lit. Ici, le roman d’un chevalier qui combat un géant. Ailleurs, les aventures d’un paladin qui se consacre au service d’une dame ; ou celles d’un gentilhomme qui a donné sa vie à l’accomplissement d’un vœu pour
- ↑ Nietzsche, Zarathustrâ.