autres son travail et son temps. Franck donnait des leçons pour vivre. M. d’Indy en donne pour le plaisir d’instruire, de servir son art, et d’aider les artistes. Il dirige des écoles, accepte, recherche presque les travaux les plus ingrats, mais les plus nécessaires, de l’enseignement. Ou bien il s’applique pieusement à l’étude du passé, à la résurrection de quelque vieux maître. Il semble qu’il trouve tant de joie à ouvrir une jeune intelligence au sens de la musique, ou à réparer les injustices de l’histoire envers un grand musicien oublié, qu’il s’oublie presque lui-même. À quelle œuvre, à quel travailleur, dignes d’intérêt, ou lui paraissant l’être, a-t-il jamais refusé ses conseils et son aide ? J’ai moi-même éprouvé sa bonté, et je lui en garde une sincère gratitude.
Ce dévouement et cette foi n’auront pas été en vain. Le nom de M. d’Indy sera associé dans l’histoire non seulement à de beaux ouvrages, mais à de grandes œuvres : à la Société nationale de Musique, qu’il préside, — à la Schola Cantorum, qu’il a fondée avec Charles Bordes, et qu’il dirige, — à la jeune école musicale française, à cette pléiade d’artistes savants et novateurs, dont il est, en quelque sorte, le frère aîné, qui les a soutenus de son exemple et de son aide, durant les premières années, les plus dures de la lutte, — à tout ce mouvement musical enfin, qui travaille le monde, depuis la mort de Wagner et de Franck, à cette résurrection de l’art du moyen âge et de la Renaissance, — à tout le renouveau de la musique européenne… De cette évolution artistique M. d’Indy a été chez nous le principal représentant. Par son action, son exemple, ou son esprit, il fut un des premiers éducateurs musicaux de la France actuelle. Il a plus fait, pour le progrès de notre musique, que tout l’enseignement officiel des Conservatoires. Un jour viendra où, malgré toutes les résistances, par la seule force des choses, un tel homme