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VINCENT D’INDY.

franchement fastidieux[1]. » Bach lui-même n’échappe que grâce à une distinction : s’il est grand, ce n’est pas « en raison de, mais malgré l’esprit dogmatique et desséchant de la Réforme[2] ».

Je ne me mêle point de juger. Chacun est suffisamment jugé par ce qu’il écrit. Puis il y a un trop grand intérêt à se trouver en face d’une personnalité sincère, et qui parle librement. L’avouerai-je ? Je trouve même une sorte de plaisir (un peu pervers, peut-être) à certaines de ces opinions excessives, où la personnalité s’accuse plus fortement.

Ainsi, le vieil esprit gothique vit encore parmi nous, il anime la pensée d’un de nos artistes les plus connus, et, sans doute, avec lui, des centaines de ceux qui l’écoutent et l’admirent ! — M. Louis Laloy a montré dans le Pelléas de M. Debussy la persistance involontaire de certains modes du plain-chant ; et, dans le sentiment obscur de cette lointaine parenté, il retrouvait la raison du charme mystérieux qu’exercent de telles pages sur l’esprit de quelques-uns[3]. Ce paradoxe savant est possible. Pourquoi ne le serait-il pas ? Les mélanges de races et les vicissitudes de l’histoire nous ont fait une âme si riche et si diverse que nous pouvons bien y retrouver ces origines, s’il nous plaît, — ou de tout autres. D’origines, nous n’en manquons point : il n’y a que l’embarras du choix ; et, pour se décider, j’imagine que la volonté fait autant que le tempérament.

Quoi qu’il en soit, c’est du moyen âge que M. d’Indy

  1. L’Oratorio moderne. (Tribune de Saint-Gervais, mars 1899.)
  2. Ibid. — Autant dire qu’il était catholique sans le savoir. Et c’est ce que proclame un ami de la Sehola, M. Edgar Tinel : « Bach, cet artiste si profondément chrétien, protestant par erreur, sans doute, puisque en son immortel Credo, il confesse sa foi en l’Église une, sainte, catholique et apostolique (Tribune de Saint Gervais, août-septembre 11)02.) — M. Edgar Tinel est, comme on sait, un des principaux maîtres de l’oratorio belge.
  3. Revue musicale, novembre 1902.