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personne du Mahâtmâ. Tagore, rappelant les débuts du mouvement d’émancipation de l’Inde, en 1907-1908, dit que la vision des chefs politiques indiens était restée livresque ; elle s’inspirait des ombres de Burke, Gladstone, Mazzini, Garibaldi, et se montra incapable de dépasser l’élite, qui parlait anglais.

« À ce moment est venu Mahâtmâ Gandhi. Il s’est tenu sur le seuil de la chaumière des milliers de déshérités, vêtu comme un d’eux. Il leur parlait dans leur propre langue. Là enfin était la vérité, non une citation d’un livre. Aussi, le nom de Mahâtmâ qui lui a été donné est son vrai nom. Qui d’autre a senti que tous les hommes de l’Inde étaient sa chair et son sang ? Au contact de la vérité, les forces comprimées de l’âme se sont révélées. Aussitôt que le vrai Amour s’est tenu à la porte de l’Inde, la porte s’est ouverte toute grande. Toute hésitation s’est évanouie. La vérité a éveillé la vérité… Honneur au Mahâtmâ qui a rendu visible la puissance de la vérité !… Ainsi, quand Buddha fit entendre la vérité de la Compassion pour tous les êtres vivants, qu’il avait obtenue comme fruit de sa discipline de soi, l’Inde s’est éveillée dans la fleur de sa virilité ; sa force s’est répandue en sciences, en arts et en richesses ; elle a débordé par delà océans et déserts… Nulle exploitation commerciale ou militaire n’a jamais rien fait de pareil… L’Amour seul est le vrai. Quand il donne la liberté, il l’installe au centre de nous-mêmes. »