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différente), de pénétrer une conscience, surtout quand elle est aussi profonde et délicate que celle d’un Gandhi. Il est difficile d’apprécier, dans le tourbillon des faits qui, en cette année tumultueuse, remuèrent l’Inde en tous sens, si la main du pilote a toujours été sûre et gouverna le colossal navire, sans dévier ni trembler. Mais je tâcherai de dire ce que j’ai cru déchiffrer dans cette énigme vivante, avec le religieux respect que j’ai pour ce grand homme, et la sincérité que je dois à sa sincérité.


Si le pouvoir de Gandhi était grand, les dangers d’en user n’étaient pas moindres. À mesure que l’action publique s’étendait et que son frisson remuait les centaines de millions d’hommes, il devenait plus difficile de la diriger et de garder soi-même l’équilibre sur cette mer en mouvement. Problème surhumain de concilier la modération de l’esprit et la largeur de vue avec ces masses déchaînées ! Le pilote, doux et pieux, prie et s’appuie sur Dieu. Mais la voix qu’il entend lui arrive, mêlée à celle de la tempête. Arrivera-t-elle aux autres ?…