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L’homme et la femme — les deux enfants — s’épiaient, d’un regard de côté, qui ne perdait aucun de leurs mouvements. Et maintenant muets — (Marc s’était tu, quêtant la réponse à l’appel) — ils écoutaient monter en eux le désir. Et maintenant, l’ouïe suraiguë du convalescent l’entendait monter chez la femme. Mais à mesure que celle-ci le sentait, elle se faisait plus dure et plus fermée.

Et un soir vint où l’homme eut la certitude que la femme livrerait son secret. Elle tournait autour de lui, elle approchait, puis s’écartait, — le crépuscule se répandait dans la chambre, Annette sortit, ils étaient seuls — la femme hésita, se décida, vint brusquement, et elle se pencha, comme tant de fois, pour remettre en ordre les draps ; — mais cette fois, il fut sûr que ses bras allaient se refermer sur lui, que sa bouche allait fondre comme l’épervier ; et, les reins tendus, la chair hérissée, il attendait, prêt à mordre…

D’un coup d’échiné, elle se redressa ; elle recula contre le mur ; elle s’y adossa, et dit froidement :

— « Vous êtes guéri. Il est temps que chacun rentre dans sa chambre. »

Il fut assommé. De stupeur, la parole lui manqua. Puis, le dépit la lui rendit ; et jetant ses jambes hors du lit, il dit, d’une voix étranglée :

— « Sur-le-champ. »

Elle haussa l’épaule et, sans bouger :

— « Demain suffit. »

— « Pourquoi attendre ? »

Elle ne fit pas un geste pour le retenir. Il piétinait déjà le plancher, traînant après lui les draps où, dans sa colère, ses pieds nus s’étaient empêtrés. Annette rentrait. Elle s’étonna. Marc dit :

— « C’est une affaire décidée. »

Le silence impénétrable de Assia acquiesçait. Annette n’insista point, elle savait lire. Elle dit :