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En ce temps-là, Sylvie se ressouvint de son neveu. Sa furie d’affaires et de plaisirs était tombée. D’un coup de vent, comme le vent s’était levé. De sérieux craquements à sa fortune et à sa santé lui avaient rudement rappelé qu’il était l’heure de se ranger… « Rien ne sert de courir. Il faut savoir… » s’arrêter à temps !… Trop de bonne chère, trop de bons vins. Le sang aux yeux. De brusques poussées de colère folle, ou de fous rires… Après l’une d’elles, à un souper, elle fut tout près de la congestion. Elle se rendait compte, elle se voyait clair et sans flatterie ; même au milieu de ses accès, quand elle avait perdu la direction, elle se disait :

— « Tu dérailles ! Serre le frein !… »

Mais le frein refusait d’agir. Les artères du cou et de la tempe battaient, et elle commençait à divaguer… Halte !… Elle se décida, dans une nuit, ferma boutique, vendit l’hôtel, réalisa. Son imbécile de Guy Coquille avait sauté, comme un œuf pourri, dans une faillite de banque et d’États : car c’était le temps où les parfumeurs, par vanité de jouer un rôle dans la politique, entretenaient, comme des filles, les gouvernements, qui d’ailleurs faisaient défaut à leur signature et les escroquaient, sans vergogne, après avoir empoché. Bien fait pour lui ! Ce n’était point cela qui troublait le sommeil de Sylvie… Mais son sommeil était troublé, toute la machine était à mettre au repos, à démonter