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Annette se retrouvait donc sur le pavé, après des expériences bigarrées. Elle avait bien failli, dans la dernière, laisser de son poil ; et toute autre qu’elle y eût semé une bonne part de sa confiance en soi et en la vie. Mais le poil de Annette était dru. Et quant à la confiance, il n’y avait point de risque qu’elle la perdît : car elle ne s’inquiétait même pas d’en avoir. — « Se confier, en qui ? en quoi ? en moi ? en la vie ?… Quelle baliverne ! Qu’est-ce que j’en sais ? Et qu’est-ce que j’ai besoin d’en savoir ?… Vouloir bâtir sur l’avenir, c’est commencer la construction par le sommet… Bon pour les hommes !… La terre n’est pas près de me manquer. Je saurai toujours où poser mes pieds. Mes bons grands pieds ! Ils ont toujours le même plaisir à marcher… »

Sa robuste constitution ne paraissait plus garder trace d’une pneumonie, suite de la grippe, heureusement jugulée sur le chemin de retour, en Italie. Et malgré ses quarante-cinq ans, pas une annonce du changement de saison. Sylvie, qui, plus jeune, en éprouvait, sans résignation, les incommodités — (et ceux qui l’entouraient, davantage : car son caractère n’y gagnait point, il était inquiet et harcelant) — établissait d’aigres comparaisons ; et elle semblait en faire à sa sœur des reproches. Annette riait et lui disait :