Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/61

Cette page n’a pas encore été corrigée

pour deux êtres, tout le reste du monde. Elle se condamna…

Hâtivement, elle fit ses préparatifs de départ. Elle savait qu’en rentrant, elle courait au devant du sort qui menaçait Pitan. Mais elle ne craignait pas tant ce sort que la pensée d’avoir livré Pitan, et d’avoir paru fuir sa part de responsabilité. Plus un instant à perdre ! Avec l’avancée allemande, la route de Paris serait, d’un jour à l’autre, coupée. Puisqu’il y avait danger pour son fils, pour les siens, sa place était près d’eux.

Franz en vain protesta. Le souci de sa personne passait maintenant au second plan. Maintenant, il pouvait vivre seul, avec son chagrin. Son deuil avait pris des formes plus apaisées ; il était à cette heure où se refait avec lui l’harmonie de la vie ; il en devient un élément ; il ne risque plus de détruire, il occupe et nourrit ; il est un compagnon même, dans l’isolement.

Annette ne laissait point, d’ailleurs, l’ami dans l’abandon. Elle tenait toujours compte des hasardeuses suggestions, sur un esprit inquiet et mobile, d’une solitude trop complète, succédant à des mois de complète intimité. Elle s’était mise en quête d’une société discrète qui, sans l’impor-