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implorante d’Annette. Mieux qu’Annette. Elle rexpérimenta ; d’une patte fourrée, elle en joua, sans en avoir l’air. Annette se sentit vaincue. Elle en eut honte et joie.

Sur la demande de Sylvie, elle lui montra tout son appartement. Elle ne l’eût pas fait, d’elle-même ; elle craignait de la froisser, en étalant le bien-être dont elle était pourvue ; mais, à son soulagement, Sylvie n’en manifesta pas la plus petite gêne. Elle était fort à l’aise, allait, venait, regardait et touchait, comme si elle était chez elle. Ce fut plutôt Annette qui se sentit choquée de ce parfait sans-gêne ; et en même temps, elle en fut réjouie dans sa tendresse. Passant près du lit de sa sœur, Sylvie donna sur l’oreiller une petite tape amicale. Elle examina curieusement la table de toilette, d’un regard fit la revue exacte des flacons, passa distraitement dans la bibliothèque, s’extasia devant une paire de rideaux, critiqua un fauteuil, en essaya un autre, fourra son nez dans l’armoire entr’ouverte, palpa la soie d’une robe, et, ayant fait son tour, revenue dans la chambre à coucher d’Annette, s’assit dans le fauteuil bas, près du lit, continuant l’entretien. Annette lui offrit le thé, auquel Sylvie préféra deux doigts de vin sucré. Tandis que, du bout de la langue, elle suçait un biscuit, Sylvie regardait Annette, hésitante,