Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 1.djvu/45

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Un long couloir commun, sans tapis, carrelé. À droite, à gauche, deux portes entr’ouvertes : d’un logement à l’autre, des voix se répondaient. De la porte de gauche venait sur les carreaux rouges un reflet du couchant. Là habitait Sylvie.

Annette fit : « Toc ! toc ! » On lui cria : « Entrez ! » sans cesser de bavarder. Elle poussa la porte ; la lueur du ciel doré vint la frapper en face. Elle vit une jeune fille, à demi dévêtue, en jupon, épaules nues, pieds nus dans des savates roses, qui allait et venait, en lui tournant le dos souple et dodu. Elle cherchait quelque chose sur sa table de toilette, se parlant toute seule, et se poudrant le nez avec une houppette.

— Eh bien ! Qu’est-ce que c’est donc ? demanda-t-elle, d’une voix qui zézayait, à cause des épingles qu’elle mordait de côté.

Puis, subitement distraite par une branche de lilas, qui trempait dans son pot à eau, elle y plongea le nez, avec un grognement de plaisir. En relevant la tête et regardant ses yeux rieurs dans le miroir, elle aperçut, par derrière, hésitante, sur le seuil de la porte, Annette, auréolée de soleil. Elle fit : « Ah ! » se retourna, ses bras nus levés autour de sa tête, prestement renfonçant les épingles dans la chevelure refaite, puis vint, les mains tendues, — et sou-