ANNETTE ET SYLVIE 269
douleur de son amour, celle de son amour-propre, l’humiliation publique, la ruine du bonheur qu’il s’était promis, tout se mêlait à la fois ; ce grand enfant gâté par la vie, qui n’avait jamais vu les choses résister à ses désirs, s’effondrait dans cette défaite : c’était une catastrophe, un écroulement de toutes ses certitudes ; il perdait foi en lui, il perdait pied, il n’avait plus où se prendre. Annette, touchée de ce grand chagrin, disait :
— Mon ami… mon ami… Ne pleurez pas !… Vous avez, vous aurez une belle vie… vous n’avez pas besoin de moi…
Il continuait de gémir :
— Je ne peux pas me passer de vous. Je ne crois plus à rien… Je ne crois plus à ma vie…
Et il se jeta à genoux :
— Restez ! restez !… Je ferai ce que vous voulez… tout ce que vous voudrez… Annette savait bien qu’il promettait ce qu’il ne pourrait tenir, mais elle était attendrie. Elle répondit doucement :
— Non, mon ami, vous le dites sincèrement ; mais vous ne le pourriez pas, ou vous en souffririez, et j’en souffrirais aussi ; la vie nous serait un conflit perpétuel…
Quand il vit qu’il ne pouvait ébranler sa résolution, il eut une crise de larmes, à ses pieds, comme un enfant. Annette était pénétrée de