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160 L’AME ENCHANTEE

ça rit, ça roule, ça vous réjouit le cœur…

— Petit populo !

— Mais, mon aristoquée, c’est toi, (tu viens de le dire), c’est toi qui es comme ça ! Si ça ne te plaît pas, tu n’as qu’à faire comme moi. Chez moi, tout est rangé. Chaque chose à sa place. Chaque lièvre à son tour !

Et certes, elle disait vrai. Quelque chahut qu’il fît sur la place Denfert, ou dans son petit cerveau, elle savait se retrouver dans l’une comme dans l’autre. Elle eût fait instantanément l’ordre dans le désordre le plus inextricable. Elle savait mettre d’accord tous ses divers besoins, et du corps et du cœur, et de la vie bourgeoise et de celle qui ne l’était pas. À chacun son casier. Comme le lui disait Annette :

— Un meuble à tiroirs… Voilà comment tu es !…
(lui montrant le fameux chiffonnier Louis XV, où les lettres du père avaient été rangées).

— Oui, répondait Sylvie, narquoise, il me ressemblait…

(Ce n’était pas du meuble qu’elle parlait).

— …Au fond, c’est moi la vraie

Elle voulait faire enrager Annette. Mais Annette ne « marchait » plus. Elle n’était plus jalouse de l’hérédité de son père. Elle en avait sa part. Elle l’eût bien cédée. C’était, à certains jours, un hôte assez gênant !…