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128 L’AME ENCHANTÉE

être plus sage, maintenant que je suis ta sœur… Je le serai, je te promets… Mais toi, sais-tu, ma grande, tu ne l’étais pas beaucoup plus.

— Non, c’est vrai, dit Annette, contrite. Et, j’en ai peur, peut-être, à des moments, que je l’étais encore moins… Ah ! fit-elle, se pressant plus étroitement contre sa sœur, que c’est étrange, le cœur ! On ne sait jamais, jamais, ce qui va se lever dedans et vous emporter… où ?

— Oui, dit Sylvie, l’étreignant, c’est pour ça que je t’aime ! Ça souffle fort chez toi !


Elles étaient près de rentrer. Les toits de l’hôtel luisaient sous la clarté lunaire. Sylvie passa le bras autour du cou d’Annette et lui dit, à l’oreille, d’une voix passionnée, avec un sérieux qu’elle ne se connaissait pas :

— Ma grande ! je n’oublierai pas ce que tu as souffert, cette nuit, — ce que tu as souffert par moi… Si, si, ne dis pas non !… J’ai eu le temps d’y penser, tandis que je courais à ta recherche, tremblante qu’un malheur… S’il était arrivé !… Ah ! qu’est-ce que j’aurais fait !… Je ne serais pas revenue.

— Chérie, fit Annette, saisie, ce n’était pas la faute, tu ne pouvais pas savoir le mal que tu me faisais.

— Je le savais très bien, je savais que je te