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ANNETTE ET SYLVIE 127

— C’est fini, répéta Annette.

Elles revinrent, par la route baignée de clair de lune, se souriant, ravies de s’être retrouvées. …Brusquement, Sylvie s’arrêta, et, montrant le poing à la lune, elle cria :

— Ah ! l’animal !… Il me le paiera !…

Et comme la jeunesse ne perd jamais ses droits, elles rirent aux éclats de ce mot de mauvaise foi.

— Mais, sais-tu ce qu’on va faire ? reprit Sylvie, rancunière. On va faire ses paquets, tout de suite, en rentrant, et demain, demain matin, filer par la première poste. Quand il viendra à table, à l’heure du déjeuner, il ne trouvera plus personne… Les oiseaux envolés !… Oh !… et puis… (Elle pouffa) Et moi qui oubliais !… Je lui ai donné rendez-vous, vers dix heures, dans les bois, tout là-haut… Il courra après moi, toute la matinée…

Elle rit de plus belle. Et Annette fit comme elle. Ce leur semblait si drôle, la tête que ferait Tullio, déçu et furieux. Les deux folles !… Leurs peines étaient déjà loin.

— Tout de même, dit Annette, ce n’est pas bien, chérie, de te compromettre ainsi.

— Bah ! qu’est-ce que ça fait, pour moi ? répliqua Sylvie. Je ne compte pas… Oui, reprit-elle, mordillant au passage la main d’Annette qui lui donnait de petites tapes sur l’oreille, je devrais