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LA FIN DU VOYAGE

eu la rouerie de faire rencontrer, à la table d’un café, Christophe avec un reporter sans qu’il se doutât de rien. Toutes ces précautions ne faisaient qu’irriter la curiosité et rendre Christophe plus intéressant. Olivier n’avait jamais eu encore affaire avec la publicité ; il n’avait pas calculé qu’il mettait en branle une machine formidable qu’on ne pouvait plus, une fois lancée, diriger ni modérer.

Il fut anéanti, quand il lut, en se rendant à son cours, l’article du Grand Journal. Il n’avait pas prévu ce coup de massue. Surtout, il ne le prévoyait pas si prompt. Il comptait que le journal attendrait, pour écrire, d’avoir réuni toutes les informations, et de connaître un peu mieux ce dont il voulait parler. C’était trop de naïveté. Si un journal se donne la peine de découvrir une gloire nouvelle, c’est pour lui, bien entendu, et afin d’enlever aux confrères l’honneur de la découverte. Il lui faut donc se presser, quitte à ne rien comprendre à ce qu’il loue. Mais il est rare que l’auteur s’en plaigne : quand on l’admire, il est toujours assez compris.

Le Grand Journal, après avoir débité des histoires absurdes sur la misère de Christophe, qu’il représentait comme une victime