beau être d’une intelligence lucide et ironique, qui raillait les paroles et les actes excessifs : quand il s’agissait de défendre Christophe, il dépassait en violence tous les autres et Christophe lui-même. Il perdait la tête. En amour, il faut savoir déraisonner. Olivier ne s’en faisait pas faute. — Toutefois, il était plus habile que Christophe. Ce garçon, intransigeant et maladroit pour lui-même, était capable de politique et presque de rouerie pour le succès de son ami ; il dépensait une énergie et une ingéniosité admirables à lui gagner des partisans ; il réussissait à intéresser à lui des critiques musicaux et des Mécènes, qu’il eût rougi de solliciter pour lui-même.
En dépit de tout, ils avaient bien du mal à améliorer leur sort. Leur amour l’un pour l’autre leur faisait commettre beaucoup de sottises. Christophe s’endettait pour faire éditer en cachette un volume de poésies d’Olivier, dont on ne vendit pas un exemplaire. Olivier décidait Christophe à donner un concert, où il ne vint presque personne. Christophe, devant la salle vide, se consolait bravement avec le mot de Haendel : « Parfait ! Ma musique en sonnera mieux… » Mais cette forfanterie ne leur rendait pas l’argent qu’ils avaient dépensé ; et ils rentraient au logis, le cœur gros de l’indifférence des gens.