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ANTOINETTE

et de garder en eux le contact des choses aimées. Enfin, ils firent effort pour s’arracher, chacun, à l’égoïsme de ses pensées douloureuses, et ils se réunirent dans la chambre de Mme  Jeannin, — la chambre familiale, avec une grande alcôve au fond : c’était là qu’autrefois ils se réunissaient, le soir, après dîner, quand il n’y avait pas de visites. Autrefois !… Tout cela leur semblait si loin déjà ! — Ils restèrent sans parler, autour du maigre feu ; puis, ils dirent la prière ensemble, agenouillés devant le lit ; et ils se couchèrent très tôt, car il fallait être levés avant l’aube. Mais ils furent longtemps, avant que le sommeil vînt.

Vers quatre heures du matin, Mme  Jeannin, qui, toutes les heures, avait regardé à sa montre s’il n’était pas temps de se préparer, alluma sa bougie et se leva. Antoinette, qui n’avait guère dormi, l’entendit et se leva aussi. Olivier était plongé dans un