Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 6.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

77
ANTOINETTE

avait dites à son mari, la dernière fois qu’elle l’avait vu vivant. Olivier songeait à l’entretien sur le banc de la terrasse. Antoinette songeait à ce qui adviendrait d’eux. Aucun n’avait l’ombre d’un reproche dans le cœur pour l’infortuné, qui les avait perdus avec lui. Mais Antoinette pensait :

— Ah ! cher papa, comme nous allons souffrir !

Le brouillard s’obscurcissait, l’humidité les pénétrait. Mais Mme  Jeannin ne pouvait se décider à partir. Antoinette vit Olivier qui frissonnait, et elle dit à sa mère :

— Maman, j’ai froid.

Ils se levèrent. Au moment de s’en aller, Mme  Jeannin se retourna, une dernière fois, vers la tombe :

— Mon pauvre ami ! dit-elle.

Ils sortirent du cimetière, dans la nuit qui tombait. Antoinette tenait dans sa main la main glacée d’Olivier.

Ils rentrèrent dans la vieille maison.