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Elle partit. Tandis qu’Olivier rentrait, le cœur glacé, au dortoir du lycée, où il avait accepté d’être mis en pension, le train emportait Antoinette douloureuse et transie. Les yeux ouverts dans la nuit, tous deux sentaient chaque minute les éloigner davantage l’un de l’autre ; et ils s’appelaient tout bas.

Antoinette avait l’effroi du monde où elle allait. Elle avait bien changé depuis six ans. Elle, si hardie autrefois, et que rien n’intimidait, elle avait pris une telle habitude du silence et de l’isolement que c’était une souffrance pour elle d’en sortir. L’Antoinette rieuse, bavarde et gaie des jours de bonheur passés, était morte avec eux. Le

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