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semble qu’il n’y a moyen de réussir que par les p… et l’argent. Si ce n’est pas cette voie, je dis avec toi que je n’y compte point, et c’est à quoi je m’en tiens ; tu as beau m’annoncer une démarche étrange, je ne puis la supposer auprès de certaines gens[1].

J’ai reçu les compliments de condoléance de ma cousine[2] sur mes maux passés et mon chagrin de ne pouvoir plus nourrir ; tu lui diras, si tu la vois, que son compliment m’a fait d’autant plus de plaisir qu’il n’est plus de saison, et que je crois qu’elle en sera bien aise ; du reste, amitiés, etc.

Les affaires du tripot ressemblent au bal de l’Hôtel de Ville[3] : c’est une réunion de sottises faites par une canaille plus ou moins distinguée. C’est la même répétition en Béotie ; et comme tu dis, on en est à chercher les épithètes ; je ne me charge, en vérité, pas de les trouver : il faudrait les créer et se souiller à pareil ouvrage.

Mme de Chg. [Chuignes] m’a envoyé demander ton adresse, par son nigaud de laquais, plus nigaud cent fois que les sot qu’elle paraît chercher a plaisir pour son service ; j’ai répondu par un billet honnête, mais à la troisième personne. J’ai : 1° offert mon entremise ; 2° donné le couvert de M. Tlz. [Tolozan] ; 3° ton adresse directe, au cas de petites choses à te remettre à Paris.

Je te dirai que ma petite m’inquiète par ses vomissements, et ses aigreurs ; dans les instants de liberté qu’elle me laisse, je vais feuilletant l’Encyclopédie et autres, aux mots enfant, nourrice, maladie des premièrs, etc. Je t’assure que les savantes dissertations et les beaux préceptes paraissent bien bêtes ou bien insuffisants quand il s’agit d’en faire

  1. Roland répond, le 1er février (ms. 6240, fol. 138-139) : « Il n’y a point de maîtresse sur le tapis pour l’affaire en question ; ce serait bien sans doute la marche, je m’en servirais comme d’une autre, mais je ne la connais pas. »
  2. Mlle Desportes.
  3. Le bal donné par l’Hôtel de Ville de Paris pour fêter la naissance du Dauphin, Louis-Joseph-Xavier-François, né le 22 octobre 1781. Roland, dans sa lettre du 24, disait  : « Le bal de l’Hôtel de Ville fit cohue ; les perruquiers avaient des billets à discrétion ; ceux qui n’ont pas trouvé à les placer à leur gré, ce qui s’entend, se sont habillés ou déshabillés, et on été faire partie de la bonne ou mauvaise compagnie… » — Cf. Mémoires secrets, 24 janvier 1782.