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qui s’est mêlé de ce mariage. Opère maravigliosa !… Si je ne me sentais émue pour le neveu et sa sœur, cette folie m’en ferait dire. Tu en imagines déjà ; revenons au grave.

Le musée dont tu me parles n’a-t-il pas fait tomber celui de M. de la Blch. [Blancherie][1] ? Tu ne préviens pas mes craintes là-dessus ; c’est d’une grande cruauté.

Je n’ai rien entendu dire de Mme du Maug.[2] depuis le temps que tu sais ; rien dans ma maladie, rien depuis ; il y a quelque cause à ce grand silence. Croit-elle que j’aie pu lui faire des visites et que je l’aie négligée ? Est-elle aussi malade ? Il faut l’un ou l’autre. Si tu voyais beaucoup Notre-Dame du Palais-Royal[2], tu pourrais savoir cela sans le demander. Au reste, je ne m’en soucie guère : soit ce qui pourra.

Tu prends donc des drogues de l’Esculape, et M. Lanthenas[3] avec toi ? Il m’écrit que vous faites deux déjeuner dont le premier n’est pas plaisant. J’en fais deux aussi, mais également bons, et je m’en vais prendre mon cinquième repas ; il est huit heures. Adieu, mon bon ami ; je t’embrasse bien tendrement.

  1. Ce nouveau Musée, c’est celui que venait de fonder Pilâtre de Rosier. — Mammès-Claude Pahin de Lablancherie (1752-1811) avait été le premier amoureux de Marie Phlipon. — Voir sur lui les Mémoires, II, 143-144, 152 et suiv. 221-225, et les Lettre Cannet, édit. Dauban, presque à toutes les pages. Ce littérateur médiocre, mais remuant, ayant les qualités d’un agent d’affaires, tenta à Paris, dans les années qui précédèrent la Révolution, vingt entreprises de publicité : « Bureau général de correspondance pour les sciences et les arts », « Musée », etc., qui tombèrent les uns après les autres. Voir Mémoires secrets, du 8 mai 1780 au 2 mars 1785. Voir aussi la suite de cette correspondance, ainsi que notre étude sur « Marie Phlipon et Roland » (Révol. française, mai 1896). — Roland, dans ses voyages à Paris, allait de temps en temps aux séances du Musée de Lablancherie, et en donnait des nouvelles à sa femme, en la plaisantant sur « son ancien amoureux ».
  2. a et b Ceci confirme notre conjecture que Mme Dumaugin est la mère de « Notre-Dame du Palais-Royal ». — Voir lettre précédente du 18 janvier.
  3. Lanthenas, qui était avec Rolan à l’hôtel de Lyon, faisant ses études de médecine, avait écrit à Madame Roland, le 19 janvier (ms. 6241, fol. 258-259) : « Nous déjeunons, votre ami et moi, depuis quelques jours deux fois, la première collation n’est pas très ragoûtante ; nous la prenons le plus matin que nous pouvons. »