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devait, selon lui, après avoir proclamé le droit nouveau, et épuisé par là son mandat, faire place à une autre assemblée qui rédigerait la loi constitutionnelle. Cette singulière interprétation du serment du Jeu de Paume était la thèse des Roland (voir lettre 326) et de leurs amis. On est toujours enclin à restreindre le mandat des assemblées dont on ne fait pas partie au profit de celles qui leur succéderont et où l’on espère entrer.

Pendant un voyage que Bancal fait en Auvergne, en octobre et novembre 1789, sa correspondance avec les amis de Paris ne s’interrompt pas. Deux lettres que lui adresse Bosc (ms. 9533, fol. 114-117), les 11 et 20 octobre, attestent une fois de plus l’amitié étroite qui existait entre eux, Garran de Coulon et Creuzé-Latouche. La collaboration au Patriote continuait également. Le numéro du 19 octobre contient une « lettre d’un voyageur », datée de Clermont, 8 octobre[1]. Mais en même temps Bancal travaillait à se faire, dans sa province la situation politique qu’il avait laissé échapper à Paris. Le 3 novembre, il faisait voter par les citoyens de Clermont, réunis en assemblée générale, une Déclaration des principes et droits sur lesquels doit être fondée la constitution municipale de la cité, et il était élu « membre du Comité permanent de la ville de Clermont pour le mois de novembre ». (Mège, p. 15 et 173.) Il envoya aussitôt sa Déclaration à Brissot, qui lui répondit, le 11 novembre (collection Picot) : « Je reçois, mon cher ami, votre Adresse et votre lettre… Je parle de l’Adresse dans le numéro de demain… [Suivent des nouvelles du jour]… Adieu, continuez à me donner des nouvelles de votre province… Ces dames [Mme  Brissot, Mme  Dupont, etc.] ont été bien sensibles à votre souvenir et vous disent mille choses… ». On voit, par ce simple mot, que les amis politiques de Brissot étaient aussi ceux de son modeste foyer[2].

Le 18 novembre, le Comité permanent de Clermont faisait voter, dans une assemblée générale de tous les citoyens, l’envoi à Paris de trois députés extraordinaires, pour y défendre l’intégrité de la province d’Auvergne. Le comité de division de l’Assemblée nationale travaillait alors au partage de la France en départements, et il s’agissait d’obtenir que l’Auvergne n’en fit qu’un seul.

Bancal fut un des trois commissaires désignés. Il arriva à Paris, avec ses deux collègues, dans les derniers jours de novembre : disons tout de suite que leur mission aboutit, sinon à un succès complet qu’on ne pouvait espérer, du moins à un résultat suffisamment avantageux, la création du beau département du Puy-de-Dôme, avec Clermont pour chef-lieu. Aussi furent-ils reçus triomphalement lorsqu’ils rentrèrent, le 13 février, dans leur ville. (Mège, p. 18.)

C’est durant ce séjour à Paris (fin novembre 1789-février 1790) qu’il se fit recevoir membre de la Société des Amis de la Constitution, c’est-à-dire du Club des Jacobins. La Société naissait à peine (Aulard, Jacobins, t. I, p. xvi). Il peut donc être considéré comme un de ses fondateurs.

Il fut également, avec Sieyès, un des fondateurs, en janvier 1790, du Club de 1789,

  1. Voir, dans le Patriote du 23 novembre, une autre lettre de Clermont-Ferrand, c’est-à-dire de Bancal, du 17.
  2. Ainsi Lanthenas, Bosc, Valady (ms. 9534, fol. 343-344), et plus tard Girey-Dupré, Riouffe, Souqué, Marchena, etc.