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Il ne laissait d’ailleurs aucune fortune, puisqu’il fallut vendre sa charge et même, probablement par suite de formalités judiciaires exigée par Mme  de Boinville, « ses effets » (lettres 127 et 134). L’amour de l’étude, le désintéressement, l’insouciance voilà cd que Louis Bosc trouva dans l’héritage paternel.


§ 2. Son enfance.

Il avait perdu sa mère peu après sa naissance. Il passa les cinq premières années de sa vie (1759-1764) auprès de son aïeule maternelle, Mme  d’Hangest, à la campagne, aux environ de Laon (Silvestre, Éloge), probablement vers Vissibnicourt[1], car c’est de ce village que sont datées les lettres écrites à Bosc, en 1795, par son oncle, le général d’Hangest, retraité au pays natal[2]. Lorsque son père alla s’installer à Servin, il y fit venir l’enfant, qui vécut là cinq autres années (1764-1769), au milieu des grandes forêts du Bassigny. Cette vie libre dans les champs contribua assurément, non moins que l’exemple de son père, à faire de lui un naturaliste. Mais lorsque le verrier quitta Servin pour la Margeride, l’enfant dut entrer au collège des Godrans[3], à Dijon. On le destinait à l’artillerie, où la protection des d’Hangest lui promettait de l’avancement. Durant les huit années qu’il passa dans cette maison (1769-1777 ), il y eut pour condisciples et amis les deux fils d’un médecin naturaliste alors célébre dans sa ville, Hugues Maret, et qui devinrent plus tard, l’un, Jean-Philibert, préfet et conseiller d’État de Napoléon[4], l’autre, Bernard, le duc de Bassano. Nous croyons aussi qu’il y connut le conventionnel Masuyer. Il ne semble pas d’ailleurs avoir été un brillant écolier. Dans les trois palmarès (1770, 1776, 1777) du collège Godran qui subsistaient pour cette période, nous rencontrons bien les noms des deux Maret, mais non celui de Bosc[5]. Le dégoût dut croître lorsqu’il lui fallut, après ses humanités, suivre les cours de mathématiques. Heureusement qu’il obtint, dans les deux dernières années, la permission d’aller suivre les cours de botanique que professait depuis 1778, sous les auspices de l’Académie de Dijon, le médecin Durande, « qui avait alors à Dijon quelque célébrité », dit Cuvier. On peut voir, dans la Correspondance (lettre 163), que Bosc, après sa sortie du collège, resta en relations non seulement avec Durande, mais aussi avec deux des autres savants qui professaient à côté de lui, Guyton de Morveau et Hugues Maret[6], le père de ses amis.

Quand le docteur Bosc d’Antic fut rentré à Paris et y eut acheté sa charge de médecin du Roi, il rappela auprès de lui son fils Louis et, renonçant à le faire entrer dans l’artillerie, lui obtint un petit emploi d’abord dans les bureaux du contrôleur général (1777), puis dans ceux de la Poste (1778).

  1. Canton d’Anizy-le-Château, à 20 kilomètre de Laon.
  2. Collection Beljame.
  3. ou plus exactement collège Godran (du nom du fondateur), tenu par les jésuites jusqu’en 1763, municipal ensuite.
  4. Il y a, dans la collection Beljame, une très intéressante lettre de Jean-Philibert Maret à Bosc, du 26 messidor an iv.
  5. Renseignements dû à l’obligeance de M. Kleinclausz, professeur à l’Université de Dijon.
  6. Le cours de chimie de Guyton de Morveau et le cours de matière médicale de Huges Maret ne s’étaient ouvert qu’en 1776.