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ait fait sortir Roland de Paris. Ce qui est certain, c’est que le premier asile du fugitif fut le prieuré de Sainte-Radegonde, dans la forêt de Montmorency, petit bien d’église que Bosc avait acheté pour le compte de Bancal, le 14 février 1792 (A. Rey, Bosc, p. 22), et où il recueillit le proscrit. De là, Roland gagna un autre refuge (Amiens ?), puis Rouen, où il dut arriver vers le 18 juin (à la date du 22 Madame Roland savait déjà qu’il y était parvenu, voir lettre 534), chez les vieilles amies de sa jeunesse, les demoiselles Malortie. Il y demeura, bien caché, « bien choyé », continuant à correspondre secrètement avec sa femme prisonnière, s’occupant de la faire évader, écrivant des Mémoires où il déchirait Buzot, puis, sur la prière de sa femme, les jetant au feu, mais toujours plus sombre, plus découragé, jusqu’au jour où, apprenant qu’elle avait été condamnée à mort par le tribunal révolutionnaire, il sortit de sa retraite pour aller se tuer en pleine campagne, dans la nuit du 10 au 11 novembre 1793[1].

Quant à Madame Roland, écrouée à l’Abbaye le 1er juin, élargié le 24, mais ressaisie deux heures après pour être incarcérée à Sainte-Pélagie, transférée à la Conciergerie le 31 octobre, elle fut jugée et condamnée par le tribunal révolutionnaire dans la matinée du 8 novembre et exécutée dans l’après-midi du même jour.

Nous ne croyons pas qu’il convienne de retracer ici l’histoire de cette captivité. Elle se trouve dans les Mémoires et dans les Lettres que nous publions, et les notes que nous avons jointes à ces lettres suffiront, il nous semble, pour expliquer toutes les particularités essentielles. Cet Avertissement a donc eu surtout pour objet, ainsi que nous l’avons dit, de marquer les circonstances, nécessaires à connaître, dont Lettres et Mémoires ne rendent pas compte suffisamment.

  1. Voir, dans la Révol. fr. de juillet 1895, notre « Note critique sur les dates de l’execution de Madame Roland et du suicide de Roland. »