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contient de mon écrit sur la presse et de celui sur l’inégalité entre les enfants[1], qui doivent me rendre présent aux électeurs, si toutefois cela est possible, au milieu de la chaleur des intérêts qui les mouvront, je vous prie de faire quelque recherche dans les principaux dépôts de chargement de votre ville, pour savoir si cette caisse est passée, et accélérer son expédition par le carrosse s’il le faut ou autrement.

J’imagine que votre Société a fait la distribution des 300 exemplaires de l’écrit sur la presse que vous lui aviez laissés.

Vous aurez trouvé chez Monsieur votre frère[2] le paquet qui renfermait mes deux manuscrits, l’un un projet d’adresse à l’Assemblée nationale, et l’autre une opinion que je voulais lire aux Jacobins où, alors, je ne pus jamais obtenir la parole. Je vous serais obligé d’en faire ce dont je vous priais alors, qui était de m’en faire tirer une copie et de l’adresser à la Société du Puy en lui disant la cause qui a fait que cela a été arrêté chez vous.

L’Assemblée nationale va de pis en pis. Petion était, hier, désolé, non de l’insolence des méchants qui ont eu l’impudence de dire à la tribune que ses discours et ceux de Robespierre dans la tribune étaient cause de l’insubordination des soldats, non des mauvais décrets mêmes, mais de la mort qui a été portée à l’opinion publique par toute cette affaire du Champ de Mars. Elle ne se manifeste par aucune chaleur de patriotisme. Il semble que le despotisme ait repris ici tout son empire.

Cependant on annonce la sortie des pétitionnaires du Champ de Mars des prisons, pour le premier jour. Mais Monade répand en plus d’abondance encore ses poisons. Le corps électoral d’ici se montre mal. Lacépède[3] le préside. Les patriotes y sont désignés sous le titre de mauvaises têtes, hommes dangereux ; jugez. Si les départements, encore une fois, n’aspirent maintenant à sauver la France, font est perdu.

On lut hier à la tribune des Jacobins une opinion vigoureuse sur la nécessité de continuer de garder le Roi dans la capitale. Elle fut très applaudie. Le mouvement oratoire qui y était ne plut pas à quelques modérés[4]. Je ne sais quel parti on va prendre. C’est ce matin que l’on propose un mode pour faire accepter la Constitution à ce sire. Salut.


F. Lanthenas.

Mardi 30[5].

Nous avions dû vous écrire par le courrier de samedi dernier ; nous en

  1. Sur ces écrits de Lanthenas, voir Appendice L.
  2. L’aîné des frères de Bancal, qui était demeuré à Clermont, où il continuait l’industrie du père.
  3. Le naturaliste Lacépède (1756-1825), ou plutôt, comme on écrivait alors, « M. le comte de La Cépède » (Alm. roy de 1789, p. 553), avait succédé à Daubenton jeune, en 1786, comme garde et sous-démonstrateur des cabinets d’histoire naturelle au Jardin du Roi. Il était entré dans les mouvements de 1789 et avait été élu parmi les administrateurs du département de Paris, mais il était tiède.
  4. Voir, sur cette séance du 28 août Aulard, t. III, 103-105. Le compte rendu ne mentionne pas l’incident dont parle Lanthenas.
  5. Ce qui suit est de Madame Roland.